Les sultans mamelouks sont de fervents mécènes des calligraphes, parmi lesquels Muhammad ibn Ahmad al-Zaftâwî (1349-1403) et Zayn al-dîn Abd al-Rahmân b. Yûsuf connu sous le nom d’Ibn Sâ’igh (1367-1441). Sous cet empire, l’un des plus grands Corans mamelouks connus à ce jour a été calligraphié en un peu moins de soixante jours, démontrant ainsi la virtuosité des artistes de cette époque.
L’école mamelouke atteint son apogée à partir de 1230 et se distingue par l’utilisation de formes anguleuses, de lignes épaisses et de décors géométriques élaborés. Les calligraphes de l’époque développent et perfectionnent différents styles d’écriture en les adaptant à leurs préférences esthétiques et aux besoins des commanditaires mamelouks.
1. Styles calligraphiques
1.1 Thuluth (IXe siècle)
Le thuluth signifiant littéralement « un tiers », est le style le plus complexe de la calligraphie arabe. Son apparition remonte au IXe siècle et son développement atteint son apogée aux XIIIe et XIVe siècles. Considéré comme référence pour évaluer la beauté des autres styles, il est principalement utilisé par les mamelouks (XIVe et XVe siècles).
Le thuluth se caractérise par des formes arrondies et un mouvement souple et rythmé, idéal pour les titres. Les lettres sont écrites aux deux tiers et au tiers rond par rapport à la lettre originale. On le trouve fréquemment dans les mosquées, les caravansérails, les pierres tombales, les inscriptions de madrasa et les plaques ornementales.
Il est particulièrement encouragé par le Sultan mamelouk Rukn-Ad-Dine Baybars 1er (1260 – 1277) pour la décoration sur verre, métaux divers, ivoire, textile, la gravure sur bois et la taille de la pierre.
1.2 Muhaqqaq (Xe siècle)
Le style muhaqqaq est l’un des principaux styles calligraphiques de l’écriture arabe. Le terme muhaqqaq signifie « orné » ou « embelli », ce qui reflète les caractéristiques esthétiques de ce style. Il émerge au Xe siècle en Irak et en Égypte. Ce style majestueux est largement utilisé pour la copie du Coran et d’autres textes religieux. Il atteint son apogée pendant la période mamelouke en Égypte et en Syrie (XIIIe -XVe siècle).
Le muhaqqaq caractérisé par une grande minutie, est considéré pendant des décennies comme la référence de la retranscription religieuse. Il se distingue par ses lignes courbes et élégantes, ainsi que par l’utilisation de larges espaces blancs entre les lettres et les mots. Il accorde une attention particulière aux proportions des lettres et à l’espacement régulier, ce qui crée une harmonie visuelle et un équilibre esthétique.
1.3 Ghubârî (IXe siècle)
L’écriture Ghubârî, également connue sous le nom d’écriture « poussière », est à l’origine conçue pour des missions ultra confidentielles et la transmission de messages postaux par des pigeons voyageurs. Son format réduit donne ensuite naissance à des corans miniatures, ne dépassant pas cinq centimètres de hauteur. Elle se caractérise par sa petite taille et est souvent associée aux styles naskhî et ruq’â.
Historiquement, l’écriture Ghubârî est employée pour copier de courts versets coraniques réputés pour leur pouvoir protecteur tels que le verset du Trône de la sourate al-Baqâra (II, 255). On la retrouve principalement dans des manuscrits de corans miniatures de forme octogonale, des rouleaux ainsi que dans des écrits à caractère talismanique.
1.4 Zoomorphe
Le zoomorphe, ou l’utilisation d’animaux dans la calligraphie arabe, a une longue histoire à travers les différentes cultures de la civilisation islamique. Les artistes calligraphes ont développé des techniques pour donner aux lettres arabes des formes animales telles que des oiseaux, des poissons, des lions et des chevaux. Au fil des siècles, cette pratique a évolué pour refléter les influences artistiques et culturelles des différentes aires géographiques. La calligraphie arabe, profondément enracinée dans la culture islamique, a incorporé divers éléments artistiques et stylistiques au fil du temps.

Calligraphies du nom d’Allah et du nom du Prophète Muhammad
1890
Copiste : Ali Redha
Mode : Thuluth
Papier, 37,5 x 73,8 cm
Fondation ADLANIA, Manuscrits, MAN-449

Calligraphies Allah, Mohammed, Ali, Fatima, Hassan et Hossein
Copiste : Khattat al-Tâf
Mode : Ghubârî
Papier, 29,2 x 78,5 cm
Fondation ADLANIA, Manuscrits, MAN-448

Coran sur feuillet de forme décagonale
Mode : Ghubârî
Fondation ADLANIA, Manuscrits, MAN-633
2.1 Zayn al-dîn Abd al-Rahmân b. Yûsuf (1367-1442)
Connu sous le nom d’Ibn Sâ’igh, Zayn al-dîn Abd al-Rahmân b. Yûsuf occupe la fonction d’écrivain (kâtib) auprès du sultan mamelouk circassien Farâj b. Barqûq (1386-1411). Parmi ses réalisations notables figurent plusieurs Corans, dont l’un se distingue par sa taille imposante, mesurant un mètre sur cinquante centimètres. De plus, il lui est attribué la création d’inscriptions coraniques, notamment le texte de la sourate al-Fath (Coran : XLVIII), qui fut soigneusement gravé à l’intérieur de la mosquée du Prophète à Médine. Cependant, sa contribution la plus remarquable est l’introduction de l’ijâza dans le domaine de la calligraphie.

Vase islamique en verre calligraphié
Mode : Thuluth
XIXe siècle
Fondation ADLANIA, Objets, OBJ-3124

Calligraphie zoomorphe (oiseau)
Papier, 19 x 10,5 cm
Fondation ADLANIA, Manuscrits, MAN-519

Bol en bois gravé (Chifa’)
Sourate CVIII
Fondation ADLANIA, Objets, OBJ-3129

Plaque en os avec médaillon
central entouré de noms divins
Mode : Thuluth
Fondation ADLANIA, Objets, OBJ-3100

Coffret hexagonal en os
Décor floral et géométrique avec une calligraphie centrale de la sourate CVIII
Mode : Thuluth
Fondation ADLANIA, Objets, OBJ-3106

Coran sur support en lame de feuille de palme
Écriture à l’aide d’un gravoir (minqâch)
Sourate XIX – 40 versets de la sourate XX
Mode : Naskhî
Java – Indonésie
Fondation ADLANIA, Objets, OBJ-34